Mille Îles
La Suède en été est fabuleuse ! En plus, la météo est ensoleillée, nous n’avons pas de planning fixe et pouvons sillonner l’archipel devant Stockholm à souhait. De Nyköping nous traçons notre route vers le nord, et rentrons de plus en plus dans les terres. Voici la trace du Naviot sur la carte électronique entre fin mai et début août.
A Södertälje nous passons une écluse et passons dans le lac Malären, où nous bifurquons vers l’ouest pour aller nous amarrer au pied du château de Gripsholm, résidence royale depuis le 16ème siècle.
La famille royale logeait dans ce château magnifique en été et lors de périodes d’épidémie, bien à l’abri de la vie turbulente de la capitale, tout en étant pas très éloignée. Pas assez animée au goût de certains quand-même, car un prince a fait aménager une salle de théâtre qui est toujours utilisée. Aujourd’hui, il abrite une collection de tableaux représentant toute la noblesse et autres personnages importants de l’histoire suédoise. Je n’ai jamais vu une galerie des ancêtres aussi importante que celle-ci.
Enfin, nous mettons le cap vers Stockholm, où Marc vient nous rejoindre pour trois semaines. Il doit faire des milles (nautiques) afin de valider son permis mer. Nous repassons une écluse et trois ponts basculants pour rejoindre le Vasahamn au centre de la ville. L’endroit est bien situé, sur une île où se trouve une belle brochette de musées ainsi qu’un luna-park permanent et un grand parc boisé. Nous visitons bien sûr le Vasa, bateau du 17ème siècle, construit sur commande royale, il devait être le fleuron de la flotte. Manque de chance, le roi avait des exigences concernant les mesures, l’équipement en canons et le nombre de ponts, qui ont provoque son naufrage à peine sorti du chantier naval. Il a coule à 1,5 km de son départ au premier petit coup de gîte dans une douce brise, car son premier pont de canons était trop bas sur l’eau qui est entré à flot dans les sabords ouverts. Il s’est enfoncé dans la vase, et le taux salin réduit de la baltique à empêché la pourriture du bois. Un monstre flop, mais aujourd’hui, c’est le seul bateau de cette époque entièrement conservé qui existe encore.
Nous donc voilà à Stockholm, belle capitale où nous nous sommes promenés dans tous les sens. Car quand on est dans une ville où on trouve tout, on visite aussi en cherchant le matériel pour le bateau qui manque, les guides de navigation, le copy shop pour se faire imprimer des documents, le coiffeur pour raccourcir la tignasse de Loulou, et plein d’autres choses nécessaires au bon déroulement du voyage. Ces petits buts nous font découvrir aussi des quartiers un peu hors du circuit touristique – toujours intéressant.
Nous partons avec notre nouveau matelot vers le nord-est. A travers les îles jusqu’au bord de l’archipel pour en rejoindre un autre. Les îles Åland, où l’on parle suédois, mais qui sont finlandaises. Nous y arrivons le 30 juin et amarrons à l’avant dernière bouée libre du port. Il y a plus d’une centaine de bateaux, tous arborant le grand pavois. C’est magnifique, et nous apprenons qu’il s’agit de l’assemblée générale du cruising club de Finlande qui se tient cette année à Mariehamn. Nous étions chanceux de trouver une place !
Juin est fini, et nous avons la première pluie sérieuse depuis notre départ d’Allemagne. Elle nous cloue trois jours au port. Nous en profitons pour visiter la petite ville et ses environs. Marc visite aussi le Pommern, vaisseau sœur du Passat que nous avions visité en Avril à Travemünde (voir chapitre précédent) Après cette pause, nous avons slalomé à travers cet archipel, composé de rochers arrondis, poncés par les glaciers de la dernière glaciation. C’est vraiment spécial. Peu de terre sur la roche, donc seulement des arbres qui peuvent étendre leurs racines comme les pins, les genévriers ou les bouleaux qui sortent des petites fentes dans la roche – on se demande comment ils peuvent survivre. Sinon lichens, mousses et myrtilliers poussent partout.
Tout doucement le temps s’écoule et le moment de retourner en Suède arrive. Avec un bon vent de nord-ouest (annoncé nord), nous traversons les 60 milles nautiques au près dans une mer assez hachée, mais sous un soleil éclatant jusqu’à Gräddö, petit village avec une marina bien abritée. Nous y faisons le plein de victuailles et poursuivons direction Stockholm, en nous arrêtant à des places au noms exotiques tels que Vaxholm, Furusund ou Norrviken. Petits Ports ou mouillages – c’est de toute beauté.
Après trois semaines avec notre fils, il reprend l’avion pour retourner en Suisse, et nous repréparons le bateau pour notre prochain invité. Le 19 juillet Christian nous rejoint et nous repartons entre les îles. Notre ami avait navigué il y a 30 ans dans cette région à bord de son propre voilier, et nous a montré les jolis coins qu’il avait découvert à l’époque. Cap sur Rödlöga, petite île vers l’extérieur de l’archipel, que nous avons atteint en deux étapes à naviguer à la voile tout en douceur. Pas de vagues, peu de vent de la bonne direction – le rêve de tout navigateur.
En suivant une jolie boucle, nous passons par Sandhamn, ancienne station de pilotes, marina touristique aujourd’hui. L’endroit est plaisant et a conservé son charme d’antan.
La boucle s’achève, et nous rentrons à Stockholm par le sud. C’est un vrai labyrinthe. Je pense qu’on peut naviguer des années ici, découvrant de nouvelles places idylliques à chaque virage. Christian nous quitte, et nous nous retrouvons rien que les deux. Bizarre de devoir refaire toutes les manœuvres nous même – un équipier, c’est quand-même bien… Nous mettons cap vers le sud, il faut commencer à penser à la rentrée, la saison en suède s’achève bientôt, et les commerces estivaux et les ports commenceront à fermer dès la mi-août. La météo se dégrade et nous nous mettons à l’abri de la tempête Hans à Oxelösund. Ici, nous trouvons enfin un chantier naval qui est d’accord de sortir le Naviot de l’eau afin de lui donner un nouvel antifouling. Le pauvre était plein de bernicles après trois ans sans nouvelle peinture. Après ce traitement, comme tout neuf, notre bateau nous emmènera vers de nouvelles aventures.
Un grand merci à Corinne, Marc et Christian pour leurs photos !